La persistance de la mémoire
J'ai commencé ma vie en retard
En voulant faire ce qu'il fallait
J'ai préféré les envies d'mon avatar
Sans prendre soin de mes besoins d'mec décalé.
J'avais la montre molle
Pour mesurer le temps qui s'écoulait.
Je me prenais pour une babiole
Titubant sur des instants qui tout le temps dégoulinaient.
Pour rester dans leurs p'tits papiers
Faut pas froisser les normes qui t'entourent :
Faut pas tester, faut pas être casse-pieds,
J'te préviens : ça pourrait t'jouer des tours.
Faut pas... Faut pas... Faut pas...
La peur du faux pas, de la débâcle
T incite, perfide, à prendre la grande route :
Si tous les invités suivent le même oracle
C'est parce qu'askip il les guide loin de leurs déroutes.
Dans ce poème, quand je dis "je"
J'me dis quand même que c'est beaucoup "tu"
A la question "Qu'est-ce que tu aimes, qu'est-ce que tu veux ?"
Je pense que souvent, on s'est tous beaucoup tu.
J'ai commencé ma vie à la bourre
En m'épuisant à faire c'qu'on me disait.
A force de m'fier aux avis des gens autour
J'me suis moi-même dépaysé.
Certains endroits ont le monopole
Ils m'empêchent d'aller voir ailleurs
De quel droit ma montre molle
Trotte à l'envers de mon bonheur ?
J'en ai marre de voyager sans moi
Sur l'quai d'la gare j'ai du m'oublier cent fois
Puis tu peux pas compter sur la SNCF pour t'rembourser l'trajet
A moi d'construire mes propres réfs avant d'être un hasbeen, un trop âgé !
Si ma vie est un film,
C'est à moi d'la réaliser
Ma story est légitime :
C'est le moment d'l'actualiser.
Tous les remords sur cette liste,
J'voudrais les déchirer en toute bienveillance,
Mes regrets ont la mémoire qui persiste
Mais j'voudrais qu'les aiguilles avancent.
Avec l'heure des injonctions sociales
J'suis jamais synchronisé
Par rapport à ma norme, j'me sens pourtant toujours normal
J'suis pas conforme certes, mais j'le fais pas exprès !
Quand le journal dit mardi
J'suis souvent encore lundi
Et quand on s'dit à jeudi
J'pense forcément à vendredi.
Alors j'ai posé ma montre molle
Et j'ai suivi MON lapin blanc
Adieu Cronos, bonjour Eole
J'me laisserai porter par mes propres vents.
Avis d'tempête sur le cadran de mes envies
Ding, Dong ! Le réveil sonne le début de ma quête
Mon unicité s'éveille : tout m'est permis
Je peux enfin m'inviter à ma fête.
Dans ce poème, quand je dis "je"
J'me dis quand même que c'est beaucoup "tu"
A la question "Qu'est-ce que tu aimes, qu'est-ce que tu veux ?"
Je pense que dans la vie, on s'est tous beaucoup tu.
C'est vrai qu'on est tous mortels
Il est grand temps de profiter
Dali nous le rappelle
Avec ses insectes : au diable les vanités !
Et puisque toujours ça se termine par la nuit
J'veux verser des rimes de gaité dans mes vers
Et comme le cycle de nos saisons un jour sera fini
J'veux souffler de l'été sur les déprimes de mes hivers.
Des fois je me demande ce que serait ma vie si j'avais fait d'autres choix
Bah en fait j'pense que j'me demanderais ce que serait ma vie si j'avais fait d'autres choix.
Le sablier coule comme un torrent intarissable
Ça ne sert à rien d'vouloir le remonter
C'est pas en capitalisant les grains d'sable
Qu'on récolt'ra des intérêts.
J'ai commencé ma vie en retard
Mais j'ai déjà rattrapé tous mes passés
Prendre son temps pour le futur n'est pas une tare
Dans mon filet j'ai tant d'présents à attraper !
Du coup, y a un bon plan sur le bon coin
C'est une affaire, pas une babiole
C'est juste que comme j'en ai plus besoin
J'revends pas cher ma montre molle !
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